Chronique: Personne n’attendait le bus
Angélique Eggenschwiler
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Il n’y a jamais eu de rendez-vous. On affluait en silence, attirés comme des mouches par les crottes de mouches sur le néon, drapés dans le crépuscule de ces nuits trop chaudes pour attendre le bus. Peut-être qu’au début on allait quelque part, qu’on a fini par cesser d’y aller, préférant coucher nos boguets sur le trottoir juste là, à l’angle de l’abribus, à 100 mètres de la poste et quelques vodkas Red Bull de ceux que nous sommes devenus.
Banal, cet abribus, quelques taules entourées de rien, entourées de vide, de patates et de nids-de-poule. Un endroit poisseux comme il en pousse partout dans nos campagnes, sur les routes tendres de l’adolescence où, tôt ou tard, les enfants s’égarent. Quelques courants d’air, un pénis dessiné sur le banc et des horaires jaunis entre deux affichettes consacrées au loto communal. Et puis nos tronches blafardes, mordorées par la lumière tendre de l’infini devant soi. Demain c’est l’été, qu’on se disait en gravant un chapeau au sommet du glan