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Un cours pour les seniors qui veulent faire du vélo électrique

Berne entend améliorer la sécurité des cyclistes se propulsant grâce à un moteur électrique. Faut-il un test de conduite obligatoire modulé en fonction de l’âge?

ATS

Publié le 12.11.2023

Temps de lecture estimé : 5 minutes

Katrine Piller a chuté avec son e-bike dans un parc à Zurich en tentant d’éviter un véhicule de livraison. Elle n’a pas vu une bordure. Bilan: deux doigts cassés, plusieurs bleus aux jambes et une commotion cérébrale. «Sur le moment, je ne savais plus où j’étais», déclare cette dame de 79 ans. Après cinq jours d’hôpital, la retraitée n’est plus jamais remontée sur sa bécane. Elle l’a donnée à son fils.

Lors de l’achat, Katrine Piller avait reçu quelques conseils: «Mais ça a été fait à la va-vite.» De ce fait, elle estime qu’un cours préliminaire serait judicieux. Pour tout le monde, pas seulement les seniors: «Certains sont encore en forme à 70 ans, alors que d’autres ont déjà la tremblote au guidon à 50 ans.»

De fait, l’Office fédéral des routes (Par Ofra) étudie actuellement l’utilité d’un cours obligatoire pour cyclistes d’e-bikes. L’Par Ofraest en train d’établir une liste «des compétences, capacités et aptitudes nécessaires», en faisant des distinctions par catégories d’âge. Lerapportdevraitêtreterminél’anprochain. «L’Par Ofraveut améliorer la sécurité des cyclistes d’e-bikes», confirme l’office.

Les vélos électriques sont classés en catégorie M, soit vélomoteurs. On distingue les lents (jusqu’à 25 km/h) des rapides (jusqu’à 45 km/h). Il faut avoir 14 ans au minimum pour les utiliser. Pour les e-bikes atteignant 45 km/h, le port du casque est obligatoire et le vélo doit être muni d’une plaque jaune. L’an dernier, plus de 220’000 e-bikes ont été vendus. En 2011, quelque 57’000 seulement ont été acquis. On recense aujourd’hui 55% de vélos et 45% de vélos électriques. Les e-bikes seront bientôt majoritaires.

Les chutes ont doublé

Revers de la médaille: en cinq ans, les chutes ont quasi doublé. L’an dernier, 2267 personnes ont eu un accident. En 2018, il n’y en avait eu que 1160. Le Bureau de prévention des accidents (BPA) constate qu’il y a deux fois plus d’accidents graves ou mortels par kilomètre parcouru à vélo électrique qu’à simple bicyclette.

L’an dernier, 560 personnes ont été grièvement blessées et 23 sont mortes. Un triste record. Les anciens sont particulièrement exposés. Sur 100 millions de kilomètres parcourus, 500 cyclistes de plus de 80 ans ont été accidentés. Sur la même distance, les plus jeunes n’ont que 100 accidents.

«Les seniors ont quatre fois plus de risques de mourir lors d’un accident», indique Karin Huwiler, du BPA. Toutefois, elle n’est pas favorable à des limitations trop sévères touchant les personnes âgées. La plupart utilisent des e-bikes lents. «Un cours facultatif serait une option pertinente», estime-t-elle. On pourrait exercer des manœuvres compliquées et rendre les retraités attentifs aux situations dangereuses. «Un e-bike n’est pas un vélo, c’est plus lourd, plus rapide, et cela se comporte différemment.»

Réduire les accidents

Chez Pro Senectute, la spécialiste du vélo Beatrice Steinegger considère qu’un cours offrirait la possibilité de réduire le nombre d’accidents de personnes âgées. «Les plus de 65 ans devraient obligatoirement suivre le cours.» Sinon, ceux qui en auraient le plus besoin n’iront pas aux cours facultatifs.

Beatrice Steinegger note que l’équilibre, la coordination et la réactivité diminuent avec l’âge. Certains oublient les règles de circulation: «On ignore souvent que l’on doit rouler au milieu dans un rond-point.»

L’experte cycliste ne se fait cependant pas d’illusions. L’obligation n’est pas la panacée: «Combien de gens tenteraient d’y échapper? La question des catégories d’âge est aussi difficile à trancher clairement. Des cyclistes octogénaires roulent parfaitement, alors que certains sexagénaires ne savent pas changer de vitesse à la montée.»

D’autres experts, comme Kristina Keller, de l’Université de Zurich, et Willi Wismer, de la fondation RoadCross, engagée en faveur de la prévention, considèrent que le cours doit être obligatoire pour tout le monde. Willi Wismer est président de Road-Cross: «On voit aussi chez les jeunes une très forte augmentation des accidents depuis quelques années.»

À quoi pourrait ressembler un cours? Selon Willi Wismer, à celui pour vélomoteurs de catégorie A1 (50 à 125 cm3), soit douze heures. «C’est peut-être beaucoup pour un vélo électrique, quatre heures seraient une durée optimale.» On apprendrait à se mettre en selle, à descendre, à prendre un virage et à freiner.

Quelques questions restent en suspens: qui contrôle si le cours a bien été effectué? Le vendeur de vélos, la police? Comme pour la ceinture de sécurité, Willi Wismer s’attend à des réticences: «Il y en aura toujours pour trouver cela idiot. Mais finalement, cela sauve des vies.»

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